samedi 22 mai 2010

Une petite boulette de pain ?

L'histoire c'est un peu comme le poisson : il y a le bon filet et puis, il y a les arêtes.

L'histoire coloniale récente de la France est un pavé plein d'arêtes qui ne passent pas. Ma grand-mère recommandait de manger des petites boulettes de mie pour faire passer les arêtes, alors les historiens ont essayé le truc en étudiant les témoignages des survivants, en corrélant les faits, les dates. En fouillant les archives, les correspondances et en écrivant des livres ... tout cela pour rien.

On se retrouve en 2010 avec des gens qui conspuent un réalisateur de films et trouvent un prétexte pour ressortir la panoplie du para et la batterie de médailles devant la mairie de Cannes. Longuement harangués par un député des Alpes maritimes dont l'unique souci est de se faire inviter chaque année au barbecue- merguez de l'amicale des pieds-noirs et anciens d'Algérie de Cagnes-sur-mer pour se faire réélire.

Suffit comme ça, non ? Déjà que de l'autre côté de la méditerranée toute déclaration à ce sujet est scrutée minutieusement, passée au peigne fin de la susceptibilité à fleur de mémoire et tout manquement fait l'objet de protestations officielles externes pour une surenchère à visées politiques internes. En France, dès qu'il s'agit de guerre d'Algérie, les regards s'illuminent de lueurs pas très fraternelles ni amicales .

La nostalgie de cette époque ce n'est pas uniquement le gentil et larmoyant Enrico, ni l'accent chantant et rigolo de Villalonga, c'est aussi et malheureusement une poignée minoritaire de propriétaires terriens et d'industriels qui tenaient toute l'économie ( tiens tiens, ça ne vous rappelle rien ? ) : les plaines de la Mitidja, Les Orangeraies de Bougie, palmeraies de Boussaada, puits de pétrole et de gaz et arsenaux maritimes stratégiques de Mers-el-Kébir. Le tout agrémenté d'une main d'oeuvre pas chère, corvéable et sans droits. Comment ne pas s'accrocher comme une moule à son rocher ?

Les derniers dinosaures de ces époques révolues ont transmis ce bâton merdeux de l'histoire à leur descendants dans l'espoir de continuer à faire vivre en eux la nostalgie du pays perdu ou de je ne sais quelle autre imbécilité. Certains l'ont accepté et crient dans les manifs, des mots qu'ils ne connaissent même pas.

J'estime que les générations suivantes n'ont pas à porter cet héritage encombrant et sanglant. Il faut laisser les historiens travailler, les artistes à leur art et espérer une bonne fois pour toutes que les morts retrouvent la paix qui leur est due . Tous les morts sans exception.


8 commentaires:

  1. Salut !
    Visiblement nous ne sommes pas du même bord...politique mais même pas mal, j'adhère a ton billet sans demi mesure et je crois m^me que je vais rebondir avec ! na !
    biz

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  2. je me disais bien moi aussi ...
    attention quand même de rebondir et retomber correctement sur tes pattes!

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  3. Question : A partir de combien de temps le passé devient-il de l’Histoire ?
    Pour certains, ce passé c’était hier puisqu’ils l’ont vécu et s’en souviennent. Impossible alors, d’aborder le sujet sans le recul nécessaire à l’étude historique.

    Tant qu’il y aura des survivants à cette époque, tu auras encore et toujours ce type de réactions. Et encore, je tablerais plutôt sur deux générations révolues avant que de pouvoir en parler sereinement comme un épisode de note Histoire.

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  4. Je ne suis pas tout à fait d'accord avec toi Gwendal. Benjamin Stora a tenté de faire le travail nécessaire pour que le passé soit digéré correctement. Tu as raison de dire que pour les survivants c'était hier, mais pour nombre d'entre-eux il y avait volonté de tourner la page et de pardonner (dans les deux camps). Seulement leur volonté a été annihilée par une autre, politique celle-là, qui instrumentalise tout ce qui passe à sa portée pour une misérable indemnité de parlementaire : 5000 euros. Voici toute la valeur qu'il donnent à une histoire qu'ils ignorent de manière crasse.

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  5. Heu... Je ne pense pas qu’il y est de manière correcte de digérer ce passé, et ce quel que soit le côté de la barrière. C’est trop tôt. Et le fait de vouloir tourner la page n’indique en rien que le passé est digéré pour autant. C’est une volonté politique au même titre que de garder la plaie ouverte.
    Quand tu penses que l’Histoire de France (et du monde) n’est toujours pas actée en ce qui concerne l’occupation ! 70 ans après tu as toujours des personnes pour l’interpréter différemment, et en modifier par convenance personnelle ou idéologie, les actes
    Allez ! Je me lance dans une définition. L’histoire c’est après un siècle... plus tôt c’est de l’actualité récente.

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  6. @gwendal

    C'est vrai qu'il s'agit là de volonté politique et rien de plus. Les petites gens se sont souvent vus confisquer leur passé par les propagateurs de haine. De toute évidence garder les plaies ouvertes fera toujours l'affaire de quelques uns. Tu sais, l'histoire c'était hier. je dis qu'il vaut mieux s'y intéresser tant que les témoins sont encore là pour en parler. Si on laisse trop de temps passer, les falsificateurs peuvent intervenir et biaiser les faits. Un truc comme l'affaire Karachi, il vaut mieux le traiter tant que les protagonistes sont là ; après ce sera trop tard !

    @courtial

    Je ne me permettrai jamais de déformer le nom d'un auteur de commentaires sur ton blog.
    Pourrais-tu préciser le propos ?

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  7. 1000 excuses !
    Je disais :
    Gwendal a raison, attendons l'an 2187 (ou 2235 au choix) pour avoir le "recul nécessaire" !

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  8. No problemo, ami.
    Après, ça deviendra de la préhistoire qui pourrait n'intéresser pas grand monde.

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