mardi 8 juin 2010

Gare de Hendaye, vers minuit...

Paris gare de Lyon, octobre 1990,

Nous étions heureux, ma femme et moi de ce séjour programmé à Madrid. Nous étions jeunes et nous avions dans l'idée de nous installer en Espagne pour démarrer une vie professionnelle là-bas. . . qui sait ?

A l'époque, le train qui reliait les deux capitales via Hendaye ,était du genre Corail, train de nuit, 6 couchettes par compartiment. Nous nous sommes laissés emporter par l'ambiance joyeuse et bousculée des grands départs, et munis de nos billets, nous cherchâmes notre compartiment, euphoriques, en espérant pouvoir partager l'endroit exigu qui allait nous abriter pendant plus d'une dizaine d'heures avec des gens sympathiques.

Oui, c'est bien ici. Compartiment L 15, places 63 et 64. Dans le compartiment il y avait déjà quatre personnes. Nous revérifions les billets, pour nous c'était bon. On pose nos sacs et on s'installe sur les banquettes en moleskine. Un couple de Danois, la cinquantaine bien mise, un type au physique de chef comptable rachitique et une rombière pur style dame patronnesse. On se regarde , ma femme et moi ... sourires complices.

Un moment plus tard, deux contrôleurs arrivent et demandent à voir les billets. S'en suivit une discussion entre les danois et les deux employés des chemins de fer. Ces derniers essayaient de leur expliquer que leur compartiment se trouvait quelques mètres plus loin et qu'ils ne devaient pas rester ici . Le couple ne parlant qu'en anglais, avait manifestement du mal à argumenter et se faire comprendre .Ils partirent les quatre au fond de la rame et revinrent un instant plus tard près de nous. La discussion se faisait plus houleuse dans le couloir. Le couple n'avait pas l'air de vouloir lâcher prise et les contrôleurs en manque d'arguments, cherchaient un aide des yeux. Je décidai de jouer les traducteurs (car je le suis en vrai) les deux danois ne parlant qu'anglais. On a fini par comprendre qu'ils ne voulaient pas rester dans l'autre compartiment car madame avait peur d'y passer la nuit en compagnie de : deux africains !

Inutile de vous décrire notre effarement , ma femme et moi. Les deux autres passagers n'ayant pas saisi l'affaire, gardaient le nez dans leur journal. Les contrôleurs ont fini par baisser les bras et les danois aucunement gênés , s'installèrent rassurés et plutôt contents d'eux mêmes.

Nous nous sommes dit que c'était dommage car on aurait pu profiter du confort d'une nuit de voyage dans un compartiment moins peuplé si ces deux gugusses étaient moins cons. Finalement, on s'est dit que l'autre compartiment n'ayant que deux passagers, serait moins exigu et nous prîmes nos affaires pour nous y installer. Nous avons pris soin néanmoins de faire remarquer au couple que leur attitude n'était pas digne avant de les gratifier d'un motherfucking racists, qu'ils n'ont pas bien saisi.

On entre dans le compartiment, les deux blacks étaient déjà installés en haut de leur couchettes malgré l'heure avancée. Ils nous disent bonjour en souriant. Je leur demande d'où ils viennent et où ils allaient. C'était des travailleurs maliens qui partaient chercher du boulot au sud, en Andalousie. (sûrement dans les serres géantes) . On a pris soin de refermer la fenêtre que l'autre salope avait ouvert malgré le froid !

La nuit tombe ... arrêt à Hendaye et manoeuvres pour adapter les rames françaises aux chemins de fers espagnols...il est minuit passée. Une petite brume ocre flottaient au dessus des quais vides ... il faisait frisquet. On toque doucement à la porte du compartiment : deux flics espagnols nous expliquent qu'ils doivent embarquer les deux africains (je parle aussi l'espagnol) .

Les deux maliens s'exécutent en silence et avant de disparaître, nous lancent un triste salam aleikoum.

Nous ne sommes plus jamais revenus à Madrid .


Nicolas, sur une suggestion du Coucou a lancé la proposition d'écrire un billet au contenu original. Ce n'est peut-être pas original, mais j'ai vécu cette histoire et je tenais à en faire part .

7 commentaires:

  1. Proposition réussie !
    Bravo monsieur le musicien linguiste!
    ;^)

    RépondreSupprimer
  2. Le Danemark aux Danois.... et ... la connerie aux cons. Et les vaches seront bien gardées. Tralalalalère...

    RépondreSupprimer
  3. Très belle réponse à cette étrange chaîne.

    RépondreSupprimer
  4. Mince alors, quel voyage! C'est une sortie de la "chaîne" par le haut.

    RépondreSupprimer
  5. Xian, oui, lalèere

    Nicolas, merci.

    Le coucou, oui, inoubliable voyage. Il se passe toujours quelque chose dans les trains de nuit ... ambiance.
    Je ne garde pas d'animosité particulière envers les Danois, mais ces deux-là étaient particulièrement abjects. merci.

    Mtislav, cette fois je me suis relu plusieurs fois et corrigé.
    merci.

    RépondreSupprimer
  6. Gildan, merci. Je me suis fait qualifier de maçon-psychothérapeute à une époque, jamais de musicien-linguiste (je garde la proposition).

    RépondreSupprimer

Bienvenue sur le rafiot. Je n'ai aucune tolérance pour les commentaires : injurieux, vulgaires ou racistes. Restez courtois envers les autres commentateurs et prenez un pseudo car les anonymes ne seront pas admis à bord.