Voila qui va fissurer le
consensus national ardemment recherché par cet exécutif en manque de souffle et qui peine à trouver des arguments pour fédérer autour de lui.
Je trouve dommageable pour notre démocratie que les représentants de la nation n'aient pas prise sur les décisions qui concernent les actions militaires de la France à l'étranger contrairement à d'autres pays occidentaux. La célérité de leur ralliement aux premières thèses n'est que le reflet de l'impuissance à laquelle nos élus sont réduits face à l'hégémonie de l'exécutif.
Je trouve également un peu
rapides les conclusions tirées ici et là par les autorités sur l'affaire des otages tués au Niger. Chaque heure qui passe amène de nouvelles révélations qui viennent se superposer et parfois contredire certaines versions, ce qui rend les choses encore plus complexes et tend à jeter un doute surtout au vu des
précédents en la
matière.
Je reproduis in-extenso la lettre des amis des deux otages tués que j'ai trouvée
ici et dans laquelle ils demandent la démission du ministre de la défense français et critiquent l'attitude de la classe politique bien prompte à justifier l'injustifiable .
Poitiers, le 12 janvier 2011
Monsieur le Ministre de la Défense et des Anciens Combattants,
Nous condamnons unanimement l’acte de barbarie qui nous prive aujourd’hui d’un ami cher.
Cependant, votre empressement à justifier l’intervention militaire qui a conduit à la mort d'Antoine de Léocour et Vincent Delory nous a beaucoup surpris. Réduire l'analyse de ce drame à un discours sécuritaire ne fait qu’alimenter grossièrement la presse à sensations. Cela occulte totalement les enjeux globaux de la situation économique et politique que traverse la zone sahélienne. Les épiphénomènes que nous vivons actuellement participent des conséquences de politiques étrangères occidentales vis-à-vis de ces régions.
«Ne rien faire, c’est prendre un double risque». Vos déclarations nous amènent à nous interroger sur la mission de l’armée française: consiste-t-elle à abréger les souffrances de ses ressortissants (emmenés par les ravisseurs [...] et on sait ensuite comment ils sont traités) lorsque vous, M. Le Ministre de la Défense et M. Le Président de la République, Chef des Armées n'êtes pas en mesure d'envisager une autre solution, plus digne? Ou a-t-elle pour objectifs de démontrer —quel qu'en soit le prix— que la France est prête à entrer dans l'escalade de la violence au nom de son combat pour la démocratie et contre le terrorisme (ne rien faire, c’est donner un signal que la France finalement ne se bat plus contre le terrorisme)? Sachez qu'à nos yeux la raison d’Etat ne doit jamais l’emporter sur le respect de la vie des citoyens.
Nous sommes particulièrement indignés par le ton de vos propos et de ceux de la majorité
de la classe politique française dans un consensus national sans fausse note. Nous croyons comprendre que la France, patrie des Droits de l’Homme, sacrifie ses ressortissants sur l’autel d’orientations stratégiques occultes. Vous avez effectivement pris le parti de vous mettre à l’abri de tous moyens de pression en excluant l’option des négociations. Nous nous inquiétons également du traitement différencié réservé aux citoyens et victimes en fonction
de ce que leurs employeurs représentent pour les intérêts de la France.
En conclusion, si vous «assumez» si bien cette mission, sachez dire aux Français qu’elle est un échec et prenez véritablement vos responsabilités en démissionnant. Si un tel courage vous manque, alors ayez au moins la décence de laisser reposer en paix les âmes d’Antoine et de Vincent en stoppant toute récupération politique de cet assassinat sordide.
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de nos salutations distinguées.
Les amis de Master 2 d’Antoine de Léocour
Régis Belmonte, Amélie Benokba, Elodie Bordrie, Marielle Cartiaux, Marion Leriche, Marie Marchand.
J'ai retrouvé également l'extrait d'un
article qui relate une vieille histoire qui date de 1993. Il n y a pas de rapport direct entre les deux sujets mais cela n'en demeure pas moins édifiant sur la compréhension des mécanismes de pensée de certains politiques et leur sens aigu de la stratégie, de la communication et de l'opportunisme.
Dans l'émission Lundi investigation du 6 juin 2005, Pierre Lyon-Caen revient sur l'affaire : « Il a le réflexe, qui montre l'animal politique, de faire venir le seul homme de communication, le pompier chargé de la communication, qui avait une caméra ».
Selon le reportage, l'attitude de N.Sarkozy a conduit le preneur d'otage à rompre les négociations, et Charles Pasqua a décidé d'éloigner Sarkozy du site de la prise d'otages.
A méditer donc en attendant la vérité.